lundi 8 mars 2010

Emprise de charme

La série de bandes dessinées Les tours de Bois-Maury, du très talentueux Hermann, ancrée dans le XIe siècle de notre Histoire, m'a déjà offert quelques inspirations rôlistiques. Certains de ses tomes, comme Le Seldjouki (tome 8) et Khaled (tome 9), se prêtent à une adaptation presque directe à des scénarios « historiques » en Terre Sainte, pour des jeux comme Miles Christi ou Secretum Templi ; j'y reviendrai dans de prochains billets. C'est au tome 5, Alda, que je vais m'intéresser dans ce billet-ci, car le ressort de cette intrigue est suffisamment universel pour pouvoir inspirer des MJ dans des univers très variés.

[Attention, révélation de l'intrigue]
Venant rendre visite à son vieil ami Yvon de Portel, le chevalier Aymar de Bois-Maury se rend compte que le fief de Portel est quasiment à l'abandon. L'épouse et le fils du seigneur ont disparu, et Yvon de Portel, qui a perdu la raison, n'est plus qu'une marionnette dont les fils sont tirés par Guillaumette, son ardente amante, membre d'une bande d'amuseurs-brigands qui ont investi le château. Pris au piège, lui-même, dans ce château devenu souricière, Aymar, avec l'aide de son écuyer, va croiser divers indices et utiliser quelques failles au sein de la bande de brigands pour comprendre ce qui se trame au château et libérer Yvon de cette emprise de luxure.
Dans cet album, Hermann bâtit une histoire relativement simple : une jeune femme fait tourner la tête d'un homme, le coupe de toute sa famille, et est bien décidée à se faire épouser par lui puis à l'éliminer pour bénéficier de sa fortune. Mais il arrive à donner de la profondeur à l'intrigue centrale par quelques intrigues secondaires (par exemple, Yvon a fait mettre son épouse et son fils au secret mais ne s'est pas résolu à les tuer) et par les motivations des personnages eux-mêmes : derrière cette « simple » manipulation, les personnages sont traversés d'amour parfois sincère, de chagrin profond, de jalousie, d'illusions qui se perdront, etc.

Les éléments qui rendent cette histoire intéressante pour un scénario de JdR sont, à mes yeux :
  • la simplicité de l'intrigue, qui permet de la mettre en jeu sans grande difficulté ;
  • la possibilité de la décliner dans la même perspective que dans la BD (un homme manipulé par une femme) ou dans la perspective inverse (une femme manipulée par un homme), ou dans des perspectives différentes si l'univers du jeu s'y prête (la personne manipulée et la personne manipulatrice sont amants de même sexe) ;
  • la possibilité de bâtir un scénario court, qui s'en tienne à l'essentiel de la trame, ou un scénario long incluant des intrigues secondaires, voire d'autres scénarios intercalés entre deux actes de ce scénario-ci ;
  • la capacité à adapter l'adversité au nombre de PJ composant le groupe vivant cette aventure-là. La manipulation reste centrée sur la relation entre deux personnes, mais les brigands de la bande peuvent être plus ou moins nombreux et coriaces suivant l'opposition que le MJ soit mettre en face des PJ ;
  • les modes de résolution variés : une fois que les PJ ont compris ce que trament la manipulatrice et ses complices, libérer le manipulé de l'emprise dans laquelle il est prisonnier peut prendre des formes très différentes selon le type d'univers de jeu. Dans certains cas, là où le système de justice propre à l'univers n'est pas spécialement développé, la subtilité ne sera pas forcément de mise (c'est le cas dans Alda, où la bande est écrasée dans un combat final) ; tandis que dans d'autres cas, il conviendra de trouver des moyens moins meurtriers.

Outre des adaptations directes, j'ai réutilisé cette trame en la mêlant à des éléments empruntés à un roman, Les sept cavaliers de Patricia Finney Chisholm, pour écrire un scénario pour le webzine de la Voix de Rokugan, consacré au jeu Le livre des cinq anneaux. Dans le prochain billet, je présenterai ce roman, et ce qui peut en être tiré pour du JdR, et dans le suivant, j'évoquerai le scénario que j'ai écrit en combinant les inspirations tirées de la BD Alda et du roman Les sept cavaliers.

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